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LETTRE OUVERTE AU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE FRANCAISE
"Le principe de précaution appliqué au phénomène ovnien
Préambule
On ne subit pas lavenir, on le fait. (Georges Bernanos)
En labsence même de toute intention hostile, lintrusion dune civilisation extraterrestre pourrait porter atteinte à notre environnement compris comme lensemble des conditions naturelles, sociales et culturelles constituant le théâtre des activités humaines.
La Charte de lenvironnement, qui a valeur constitutionnelle, prévoit que lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution [ ], à la mise en oeuvre de procédures d'évaluation des risques [ ].
Le phénomène ovnien
Des phénomènes aérospatiaux insolites se montrent régulièrement dans notre espace aérien. On les appelle communément OVNI. Le CNES (Centre national détudes spatiales) préfère leur donner le nom de PAN (phénomène aérospatial non identifié).
Avant que de chercher à leur donner une interprétation, il nous faut reconnaître une évidence toute simple : ils existent. Certes une grande partie relève de méprises, de fantasmes ou dhallucinations, mais une part irréductible et significative semble témoigner de lois physiques inconnues et participer dun principe intelligent.
Ils ont donné naissance à une discipline, lufologie, qui comprend deux activités bien distinctes : en premier lieu la collecte des données, en second leur interprétation. Par convention, nous désignerons, dans la suite de cette lettre, par le terme générique « phénomène ovnien » lensemble des pans qui, après examen, nont reçu aucune explication rationnelle au regard de nos connaissances scientifiques.
Les données
Un groupe détudes émanant du CNES, le GEIPAN (groupe détudes et dinformation des phénomènes aérospatiaux non identifiés), a reçu en France la mission officielle de recueillir, danalyser et darchiver les données relatives aux pans. Grâce à cet organisme et au travail obstiné denquêteurs indépendants, nous disposons aujourdhui de banques de données comportant plusieurs milliers dobservations. Leur étude statistique met en évidence la complexité et lincongruité du phénomène qui recouvre des dizaines de types dévénements, allant du plus banal, simple lumière anormale dans le ciel, au plus surprenant, enregistrement radar dobjets aux performances cinématiques inexplicables. Mais elle fait aussi apparaître une cohérence interne et des caractéristiques générales, relativement stables et rarement démenties, de réalité physique et de comportement intelligent, non hostile, discret, furtif et brouillé.
Linterprétation
Linterprétation la plus répandue parmi les ufologues soutient que le phénomène ovnien est gouverné par une (ou plusieurs) intelligence non terrestre. Dans cette hypothèse, il faut accepter lidée quil cache un dessein potentiellement hostile, un programme soutenu par une stratégie. Quel est ce programme ? Qui en sont les auteurs ? Quelle est leur stratégie ? Telles sont les questions que nous sommes amenés à nous poser face à une activité inconnue. Partant, létude du phénomène ovnien ressortit aux méthodes dappréciation des situations complexes mettant en jeu des intelligences aux desseins équivoques et des informations rares, sporadiques et brouillées.
Des méthodes hypothéticodéductives, itératives et adaptatives
Quelles sont ces méthodes ? De conception militaire, elles sont apparues durant le dernier conflit mondial, en même temps que la recherche opérationnelle. Elles sont enseignées dans les écoles supérieures de guerre (en France, le Collège interarmées de défense) et sont employées par les états-majors des grandes puissances. Les grandes entreprises, exposées aux contraintes économico-politiques et devant affronter une concurrence où la désinformation est couramment pratiquée, les ont adoptées et adaptées à leurs besoins propres. Cela explique la présence de la métaphore et de la terminologie militaires dans le discours des dirigeants de société.
Ainsi que la recherche opérationnelle, elles ont pour objet de pallier linsuffisance de lintuition et du bon sens devant des situations confuses dépendant de paramètres multiples, relevant de facteurs objectifs et soumises à des événements naturels aléatoires. Mais contrairement à la recherche opérationnelle, elles tiennent compte de limmixtion dune intelligence extérieure douée de volonté et capable de brouillage et de comportements arbitraires apparemment irrationnels. Elles sont particulièrement pertinentes en présence de désinformation et dans des conflits asymétriques opposant des adversaires aux logiques différentes, aux éthiques divergentes et aux modes de pensée dissemblables, comme la lutte contre le terrorisme ou, le cas échéant, une intrusion extraterrestre.
De quelle sorte de raisonnement ces méthodes participent-elles ? Elles sont de type hypothéticodéductif. Elles consistent à formuler des présuppositions, préalablement passées au crible des vraisemblances éthique, technique, économique et opérationnelle, dont sont déduites des conséquences, passées et futures, susceptibles dêtre vérifiées par lobservation et le renseignement. Si elles trouvent une vérification expérimentale, elles sont validées. Sinon, elles sont soit réfutées soit révisées afin de les rendre compatibles avec lexpérience. Elles sont par construction itératives et adaptatives. Elles astreignent à une pensée formalisée et rigoureuse. Tout bien considéré, elles sont une application assez fidèle de la méthode scientifique de Karl Popper.
Elles sopposent au processus inductif de pensée qui va du particulier au général, qui prétend à un énoncé général à partir dun nombre limité dobservations. Sagissant de lufologie, la méthode inductive est inappropriée en raison dune information fortement dépréciée. Elle a malheureusement conduit à deux écueils : dune part au scepticisme ou au refus de toute tentative dinterprétation car les visages polymorphe et absurde que revêtent les manifestations des pans depuis soixante années ne permettent pas de justifier un énoncé général ; dautre part, par extrapolations abusives, à lélaboration dinterprétations hasardeuses et au développement de thèses conspirationnistes.
Une possible intrusion extraterrestre
Si nous écartons a priori lhypothèse non scientifiquement réfutable dune intelligence transcendant le monde sensible, il faut bien admettre que nous avons possiblement affaire à une intrusion extraterrestre, c'est-à-dire à la présence non désirée dêtres intelligents appartenant à une ou plusieurs planètes de la Voie lactée ou dune autre galaxie.
Pour que les méthodes hypothéticodéductives lui soient applicables, encore faut-il vérifier que ces êtres peuvent raisonnablement faire lobjet de présuppositions. La difficulté vient alors, entre leurs civilisations et la nôtre, des écarts des connaissances et des évolutions : écart certain pour ce qui est des sciences et des technologies ; écart vraisemblable des évolutions biologiques et sociales et des éthiques.
Une nouvelle forme dincommensurabilité ?
Tout revient à la question de savoir si des êtres intelligents aux niveaux de connaissances inégaux et aux développements psychique et biologique éloignés seraient capables de se comprendre. A cette condition seulement, les présuppositions auront un sens et pourront être admises comme hypothèses heuristiques.
Une position est aujourdhui en faveur chez certains ufologues qui prétendent, après Carl Sagan, que les différences de connaissance et dévolution seraient en réalité des obstacles insurmontables rendant impossible notre compréhension, voire notre perception, dune intrusion.
Sil est vrai que le fossé du langage est à jamais infranchissable entre lhomme et lanimal, il ne serait pas en revanche un empêchement dirimant entre notre civilisation et celles des autres mondes technologiquement, et peut-être psychiquement, supérieurs. En effet lexobiologie tient pour probable que tous les êtres intelligents de lunivers sont dotés de capacités dinférence et de gestion du temps et que leurs schémas mentaux sont, selon toute vraisemblance, analogues sinon identiques.
Il vient quil est légitime dappliquer les méthodes hypothéticodéductives au phénomène ovnien et, par conséquent, de chercher à découvrir, au-delà de leurs modes de déplacement dans lespace, les intentions à notre égard des éventuels intrus.
Présuppositions
Elles doivent porter sur la nature de ces êtres, sur leur libre ou serf arbitre, sur leur organisation sociale et politique, leur éthique collective, leurs intentions et leurs activités. La vie revêt-elle ailleurs des formes radicalement différentes ? Les êtres biologiques extraterrestres doués dintelligence ont-ils une physiologie semblable à celle de lhomme ? Erigent-ils leurs sociétés en civilisations ? Dans lhypothèse où certains auraient acquis la maîtrise de lespace, de quelle organisation sociale et politique se seraient-ils dotés pour atteindre un tel niveau de connaissances ? Quelle serait leur éthique ? Reconnaîtrait-elle une vérité morale ? Quelle stratégie adopteraient-ils vis-à-vis des civilisations visitées ? Au service de quelle mission ? Obéiraient-ils à un principe de précaution ? Quelles procédures dapproche appliqueraient-ils ? Des signes de leur présence seraient-ils perceptibles ?
Désinformation et brouillage
Dès lors que lon tient pour plausible une intrusion extraterrestre, il convient de s'interroger sur son origine, son mobile et sa dangerosité :
- Sommes-nous en présence dune seule civilisation ou de plusieurs civilisations opérant de concert ou de manières indépendantes ?
- Sagit-il dune simple surveillance à distance, dune intervention ponctuelle ou dune tentative dinfluence ou de prise de contrôle ?
Il est vain despérer que dune démonstration ovnienne ostensible et non brouillée surgiront un jour prochain les réponses à ces graves questions parce que le phénomène est discret, furtif et brouillé et ne semble pas disposé à se dévoiler. Elles ne viendront pas davantage dune étude reposant sur linduction car il est de mieux en mieux établi quil est depuis son origine lobjet dopérations de travestissement et de déformation de la vérité :
- la désinformation mise en uvre par des fabulateurs aux intérêts obscurs et par des agences gouvernementales motivées par l'enjeu stratégique et la nécessité du secret ;
- lamplification, plus ou moins volontaire, de certains des témoins et enquêteurs ;
- le brouillage et le camouflage par les intrus eux-mêmes.
Désinformation et brouillage sont si présents quil devient difficile de faire la part entre la réalité et la fiction, de restituer une information fiable et crédible à partir des seuls récits des témoins.
Les méthodes hypothéticodéductives sont censées lever ces difficultés.
Un risque dethnocide planétaire
Quand bien même elle ne montrerait aucune intention hostile, une intrusion extraterrestre présenterait un danger de chaos pouvant conduire à un ethnocide si, par accident, elle se montrait au grand jour sans laisser aucun doute sur son origine. A défaut dune action psychologique préalable, les hommes pourraient perdre confiance dans leur capacité de maîtriser leur avenir. Léquilibre du monde en serait bouleversé.
Cependant que le génocide est lextermination dun groupe ethnique ou religieux, lethnocide est la destruction de sa culture. Le chaos nest pas propre aux systèmes physiques. Des évolutions chaotiques se rencontrent aussi bien dans dautres systèmes naturels complexes, composés de plusieurs sous-systèmes interagissant fortement. Des événements extérieurs, que les économistes appellent « chocs », pourraient jouer un rôle déterminant dans le déclenchement des involutions irréversibles. Or peut-on concevoir un choc culturel plus violent, plus déstabilisateur, que le contact impromptu avec des êtres extraterrestres qui ont mis la terre sous observation ?
Le risque dethnocide ne peut être négligé. Il doit être pris en considération au plus haut niveau de lÉtat. Là encore, seules les méthodes hypothéticodéductives sont susceptibles dapporter une aide précieuse à la décision.
Compte tenu des réflexions dordre général qui précèdent et considérant
▪ que la France sest dotée dun organe officiel de collecte et danalyse des données des pans, le GEIPAN,
▪ que le GEIPAN et son comité de pilotage nont pas reçu pour mission dinterpréter le phénomène ovnien,
▪ que, seraient-ils chargés de cette mission, ils ne détiendraient pour la mener à bien ni la compétence ni les moyens ni la méthode,
▪ que le phénomène ovnien est possiblement la manifestation de lintrusion dune ou de plusieurs civilisations extraterrestres,
▪ que, si lintrusion nest pas prouvée scientifiquement, il existe en sa faveur de fortes présomptions, comme la écrit en son nom propre dans un livre récent M. Yves Sillard, président du comité de pilotage du GEIPAN, ancien directeur général du CNES et ancien délégué général pour larmement,
▪ quune intrusion extraterrestre procède nécessairement dune politique respectant une éthique et implique un programme servi par une stratégie,
▪ quune stratégie relevant dune intelligence étrangère aux motifs incertains pourrait porter atteinte à notre environnement compris comme lensemble des conditions naturelles, sociales et culturelles constituant le théâtre des activités humaines,
▪ quelle doit donc faire lobjet, selon une méthode appropriée, dune étude dévaluation des risques, notamment le risque ethnocidaire, par application du principe de précaution conformément à larticle 5 de la Charte de lenvironnement,
▪ que la seule méthode appropriée face à une menace imprécise est la méthode dappréciation des situations complexes mise au point par les grands états-majors,
▪ que le phénomène ovnien est une affaire trop grave pour être abandonnée aux seuls GEIPAN, ufologues et associations ufologiques, à la rumeur publique,
▪ que - pour ce que lon en sait - aucune étude officielle portant sur linterprétation du phénomène ovnien na été conduite à ce jour en France,
▪ quà la suite de la publication du rapport Condon, une telle étude a vraisemblablement été menée aux États-Unis en toute confidentialité et que ses conclusions suffiraient à expliquer la désinformation que ce pays semble avoir mise en place pour préserver sa situation dominante et, peut-être, écarter le risque ethnocidaire,
les soussignés ont lhonneur de demander à Monsieur le Président de la République de bien vouloir ordonner une étude exhaustive du phénomène ovnien en application dune méthode hypothéticodéductive empruntée aux états-majors. Cette étude devrait réunir de hautes compétences dans les disciplines directement concernées : politique, militaire, scientifique, sociologique, philosophique et ufologique. Elle recevrait pour objet dinfirmer ou de valider linterprétation extraterrestre et, le cas échéant, de mettre en évidence la stratégie poursuivie par lintrusion et, si possible, ses moyens. Ainsi le gouvernement de la France serait-il en mesure de mettre sur pied, à des fins de vérification, des actions spécifiques dinvestigation scientifique et de renseignement, puis de construire sa propre stratégie, enfin darrêter la politique nationale quil conviendrait dappliquer en matière de défense, de sécurité, de recherche, de santé et de maîtrise de linformation. Il disposerait en outre déléments pertinents pour décider de la position à tenir sur la scène internationale et de linformation quil serait éventuellement nécessaire de porter à la connaissance des institutions et de lopinion publique.
A Versailles, le 14 avril 2008
Gilles Pinon Jacques Costagliola Claude Lavat
Contre-amiral (2S) Docteur en médecine Ingénieur ESME
Francis Collot Alain Labèque Vincent Morin Rémi Saumont
Chirurgien Ingénieur CNRS MCU docteur en électronique Ancien directeur recherche INSERM"
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